« Voilà une ville qui, plus que d’autres, a été victime de la stupidité des nations européennes qui croyaient régler leurs problèmes par la guerre, maintenant elle doit être appelée à devenir un symbole de réconciliation et de paix ».
Ernest Bevin, Ministre des Affaires étrangères du Royaume-Uni, 1949.
Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, l’heure fut à la reconstruction et à la réconciliation des peuples d’Europe.
Quatre ans après la fin de la Seconde Guerre Mondiale, dix Etats européens (Belgique, Danemark, France, Irlande, Italie, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas, Royaume-Uni et Suède) signèrent au Palais Saint-James à Londres l’acte de naissance du Conseil de l’Europe, organisme intergouvernemental fondé sur les droits de l’Homme.
Ce fut Lord Ernest Bevin, ministre des affaires étrangères du Royaume-Uni qui, le premier, proposa de faire de Strasbourg le symbole de la réconciliation européenne. Certains pensèrent que sa proposition, établie sur le choix d’une ville moyenne d’Europe, était une manœuvre britannique déguisée pour reléguer au second plan des centres politiques de la nouvelle initiative.
Mais les institutions européennes ont réussi à se développer au cours des décennies. Elles font partie du paysage de Strasbourg et de celui de l’Europe entière.
Strasbourg : siège d’une dizaine d’institutions européennes et internationales
Strasbourg est aujourd’hui le siège de plus d’une dizaine d’institutions et organismes à la fois européens et internationaux. Trois d’entre eux jouissent d’une forte influence internationale : le Conseil de l’Europe, le Parlement européen et le Palais européen des Droits de l’homme. Leurs bâtiments aux proportions monumentales (surtout pour le Parlement) sont devenus emblématiques pour la ville.
Le quartier des institutions européennes se situe au Nord de Strasbourg, au bord de l’eau à la confluence de l’Ill et du canal de la Marne au Rhin.
Le Conseil de l’Europe
Le Conseil de l’Europe siège au Palais de l’Europe, construit en 1975 par Henri Bernard. Il s’agit d’un imposant quadrilatère de grès rose, de verre et de métal. Devant son parvis flottent les drapeaux des 47 Etats membres.
C’est la plus ancienne des grandes institutions européennes établies à Strasbourg après 1945 ; elle a tenu sa première réunion en 1949 au Palais de l’Université. Elle ne fait pas partie de l’Union européenne et on la confond souvent avec une autre institution de l’UE : le Conseil Européen.
L’organisation est paneuropéenne, rassemblant 800 millions de citoyens et 47 Etats membres dont la France, la Russie, la Turquie, la Suisse ou la Norvège.
Ses deux langues officielles sont l’anglais et le français.
Afin de renforcer la cohésion des peuples, le Conseil de l’Europe a créé deux emblèmes officiels (également adoptés par l’Union européenne) :
Le drapeau européen
Bleu azur avec en son centre une couronne de douze étoiles or.
Adopté par l’Assemblée parlementaire en 1955, il permet à tous les Européens de s’y identifier en plus de leur propre drapeau national. Ce fut en 1983 que le drapeau fut adopté par l’Union européenne.
Le nombre d’étoiles est fixé de façon permanente à 12 et ne représente pas le nombre d’Etats membres de l’UE. Le nombre symbolise la perfection et la plénitude, au même titre que les 12 mois de l’année ou les 12 apôtres. La légende fait remonter la création du drapeau à une statue de la Vierge couronnée de 12 étoiles, les Pères fondateurs de l’Europe des années 1950 étant sensibles aux valeurs religieuses. Il est intéressant de remarquer que le Conseil de l’Europe avait offert un vitrail représentant la Vierge Marie à la cathédrale de Strasbourg afin de remplacer celui qui fut détruit par les bombardements des Alliés.
L’hymne européen
Le prélude de l’Ode à la joie de la 9e symphonie de Ludwig van Beethoven fut choisi comme hymne européen en 1971 et présenté publiquement lors de la journée de l’Europe le 9 mai 1972.
Le Parlement européen
Une des institutions les plus puissantes de l’Union européenne, le Parlement européen représente les intérêts de quelques 500 millions de citoyens européens.
Avant l’inauguration du nouveau bâtiment en 1999, les députés européens siégeaient dans l’hémicycle du Palais du Conseil de l’Europe, de l’autre côté de la rive. L’Union européenne s’élargissant régulièrement, il fallut trouver aux députés européens un lieu plus spacieux et répondant aux exigences parlementaires (cabines d’interprétation, technologies associées au vote, bureaux etc.)
L’immense pavillon de verre ne laisse pas le visiteur insensible. L’édifice est une prouesse architecturale et surtout technique : il fallait trouver le moyen le plus adéquat pour y inclure un hémicycle de 750 places (le plus grand d’Europe), 1133 bureaux, des espaces de travail et de détentes, ainsi que les services administratifs adjacents. Ces contraintes complexes ont été menées à bien par le cabinet d’architecture Studio Europe qui a livré le bâtiment en 1999.
Depuis la rivière de l’Ill, le Parlement se découvre le long d’une monumentale façade en verre semblant symboliser l’esprit de transparence de la démocratie européenne. De l’autre côté, la physionomie du bâtiment est complètement différente et, pour beaucoup, ressemble singulièrement aux ruines du Colisée de Rome. Deux grandes figures géométriques y apparaissent : l’ellipse (la tour, haute de 60 mètres et d’un diamètre de 100 mètres) qui contient le cercle (l’hémicycle) … et le cercle qui contient l’ellipse. Cette allégorie des tensions entre le cercle et l’ellipse illustre la confrontation et l’alliance dans la vie d’une démocratie.
Le bâtiment du Parlement européen fut baptisé « Louise-Weiss » en l’honneur de sa première présidente.
La localisation du siège du Parlement a fait couler beaucoup d’encre ses dernières décennies. Si les réunions plénières ont lieu à Strasbourg, certaines séances additionnelles se tiennent à Bruxelles et son secrétariat général à Luxembourg. Devant les pressions de lobbies souhaitant le transfert du Parlement à Bruxelles, le Conseil européen d’Edimbourg en décembre 1992 confirma Strasbourg comme siège du Parlement, par l’insistance commune de François Mitterrand et d’Helmut Kohl.
Le Palais des Droits de l’Homme
A la rencontre de deux cours d’eaux (l’Ill et le canal de la Marne au Rhin), le Palais des Droits de l’Homme, œuvre de l’architecte Richard Rogers, fut inauguré en 1998. Il s’agit d’un bâtiment futuriste épousant la rive droite de l’Ill.
Pour son architecte, le Palais doit être considéré comme un symbole et non pas un simple monument : la nature des affaires d’un tel lieu implique qu’il doit être tout sauf intimidant, il doit être accueillant et humain. La façade du bâtiment doit renforcer le sentiment de justice en symbolisant « la balance de la justice ». Pour l’architecte, le Palais adopte des « lignes résolument contemporaines et symboliques qui associent le droit au principe de transparence ».
Le nom officiel de l’institution supranationale abritée dans le palais est la « Cour européenne des droits de l’homme » (à ne pas confondre avec la Cour de justice de l’Union européenne qui siège à Luxembourg). Elle fut créée en 1959 à Strasbourg et sert d’organe juridictionnel relevant du Conseil de l’Europe.
Sa mission est de veiller au respect de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. En 2007, plus de 100 000 affaires ont été examinées devant la Cour européenne des droits de l’homme.
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